L'inquiétude grandit en Côte d'Ivoire à l'approche de l'élection présidentielle du 31 octobre. La crainte d'une flambée de violences se renforce dans ce pays où une bataille politique sur fond de communautarisme avait fait plus de 3 000 morts en 2010.

Le président sortant Alassane Ouattara est au centre des critiques. Après deux mandats consécutifs, il se présente à nouveau, alors qu'une révision de la Constitution adoptée en 2016 interdit ce cas de figure. De nature pondérée, il s'y est résolu après le décès accidentel de son dauphin désigné, en août. Pour ses adversaires et pour beaucoup d'Ivoiriens, le démocrate a alors endossé le rôle de l'autocrate.


Certes, son camp plaide qu'une réforme constitutionnelle ne saurait être rétroactive. Mais le chef de l'État altère l'esprit du texte adopté sous son égide. Et les doutes sont accrus par le sentiment que tout est fait, au sein de l'appareil d'État, pour qu'il gagne le 31 octobre. Le jeu électoral paraît faussé. C'est cette perception que le cardinal Jean-Pierre Kutwa, archevêque d'Abidjan, relaya il y a deux semaines en estimant que la candidature d'Alassane Ouattara n'était pas « nécessaire ».

Cela ne fait pas du président sortant un dictateur. Cependant, cet épisode traduit la difficulté de la jeune démocratie ivoirienne à enraciner le principe de l'alternance. Les présidents qui se sont succédé depuis l'indépendance l'ont fait soit dans une transmission verrouillée par le parti au pouvoir, soit dans un contexte d'affrontement. Aujourd'hui, chaque leader ivoirien a la responsabilité première de rejeter tout recours à la violence et de s'engager dans un dialogue pacifique sur l'avenir du pays. Le président Ouattara plus que tout autre.