Côte d'Ivoire: Damana Pickass « Si c'était à refaire? Ne me posez même pas la question, rebelote »

  • publiè le : 2016-07-09 03:38:39
  • tags : d'ivoire: - damana - pickass - c'était - refaire? - posez - question
Côte d'Ivoire: Damana Pickass « Si c'était à refaire? Ne me posez même pas la question, rebelote »

(Photo d'archives pour illustrer l'article)

Depuis son lieu d'exil au Ghana, Damana Adia Pickass a accordé via internet une interview à KOACI.COM.

L'homme considéré par certains comme celui par arriva le malheur revient sur son acte posé à la proclamation des résultats de la présidentielle en 2010, la crise qui secoue le FPI, la question des réfugiés, ses relations avec Guillaume Soro, la nouvelle constitution et le procès de Laurent Gbagbo.

Ci-dessous l'entretien...

KOACI.COM : Après 5 années passées hors du pays, comment peut se sentir un homme politique de votre trempe?


Damana Adia Pickass: Merci monsieur et cher frère de vous soucier de moi. Notre exil n'est certes pas facile et ce n'est pas donné à n'importe qui de vivre dans ces conditions déplorables pendant maintenant un peu plus de 5 ans loin des siens, loin de sa terre natale. Mais quand nous pensons aux raisons, aux enjeux qui nous maintiennent en exil, nous ne pouvons que développer un moral d'acier à même de résister à toute épreuve. Nous n'avons pas le droit de faiblir encore moins de verser dans le découragement voire de capituler. Donc cher monsieur, je me sens bien moralement, physiquement, spirituellement, il existe le Dieu de justice.


KOACI.COM : Qu'est-ce qui vous empêche de rentrer au pays?


D.A.P: C'est l'état d'esprit, la psychologie et la gouvernance de ce régime qui m'empêchent raisonnablement de rentrer dans mon pays. Il y règne un esprit de revanche, une haine viscérale de l'opposant, une justice de vainqueurs, une insécurité galopante etc...
Et en plus, ce pouvoir n'a pas encore digéré ce qui s'est passé à la CEI. Vous voyez qu'il serait suicidaire pour quelqu'un de ma trempe de m'aventurer dans un tel environnement.


KOACI.COM : Le chef de l'Etat ne manque aucune occasion dans ses discours pour vous tendre la main à revenir pour construire ensemble le pays...


D.A.P: Vous convenez avec moi que les appels de Ouattara aux exilés ne sont pas sincères. Du moins pour ceux qui ont décidé de demeurer fidèles à leurs convictions et de mener une opposition responsable et critique. C'est le cas d'Assoa Adou, Hubert Oulaye qui ont répondu aux appels de monsieur Ouattara dont vous parliez tantôt. Aujourd'hui ils sont en prison pour leurs idées. Le ministre Lia Bi Douayoua a dû reprendre le chemin de l'exil pour se soustraire à un emprisonnement certain. Monsieur Porquet Désiré qui n'a pas pu supporter toutes ces persécutions est décédé. Ce sont des faits et des actes vérifiables. Comment dans ce contexte pouvons-nous faire confiance à Ouattara qui dit quelque chose et fait exactement son contraire?


KOACI.COM : Vous comptez rester en exil jusqu'en 2020?


D.A.P: L'enjeu n'est pas une question de durée, j'ai précédemment décrit un certain environnement. Si avant 2020 les conditions s'améliorent et qu'il y a une réconciliation vraie et sincère, nous aviserons. Sinon nous serons dans cet exil aussi longtemps que nécessaire.


KOACI.COM : D'autres vous accusent avec certains cadres FPI exilés au Ghana de tirer les ficelles afin d'empêcher la majorité des réfugiés de rentrer au pays. Que pensez-vous de ces accusations?


D.A.P: Laissez les gens à leurs délires, à leurs fantasmes sans fondement. Les derniers exilés qui sont rentrés il n'y a pas longtemps prouvent au moins que personne n'est empêché de rentrer en Côte d'Ivoire, c'est encore un fait vérifiable. Des personnes mal intentionnées portent des accusations graves sans savoir de quoi il est question et c'est regrettable.
De quoi disposons nous pour empêcher des personnes que nous ne nourrissons pas, que nous ne pouvons pas nourrir, des personnes que nous ne soignons pas, que nous ne pouvons pas soigner, des personnes dont nous ne scolarisons pas les enfants à demeurer dans cette galère? C'est du délire, rien que du délire.
Je voudrais conclure sur cette question en invitant chacun et chacune à respecter les exilés, en arrêtant de les infantiliser, les faisant passer pour des personnes très peu responsables qui décident de souffrir en exil sous la dictée de quelques illuminés dont ils sont l'otage. C'est simplement injurieux pour ces personnes et nous ne pouvons l'accepter. Ces ivoiriens sont tellement conscients des raisons qui les maintiennent en exil qu'ils ont droit dans les yeux refuser de grandes quantité de vivres et de l'argent en espèce de la part de l'ambassadeur ivoirien au Ghana, arguant qu'ils ne sont pas des réfugiés humanitaires ou économiques. Ils n'ont pas quitté leur pays parce qu'ils avaient faim mais plutôt pour des raisons politiques que l'ambassadeur devrait s'employer à résoudre au lieu d'emprunter le raccourci malhonnête des dons. Ce sont donc des personnes qui savent ce qu'elles veulent et qui méritent considération et respect.


KOACI.COM : Selon vous, pourquoi la mission de la ministre Mariétou Koné a- t-elle échoué?


D.A.P: Mme Mariétou doit s'en prendre à elle-même. Elle n'a visiblement pas mis du sérieux dans la préparation de la mission. Elle a certainement cru que nous étions un colis qu'elle devait prendre à la gare.


KOACI.COM : Des informations en provenance d'Accra font état de deux types d'exilés: ceux qui vivent dans la bourgeoisie et ceux qui broient du noir...


D.A.P: Je note que ce discours est tenu par des personnes qui veulent coûte que coûte discréditer les cadres du FPI en exil pour les positions que nous prenons et pour les idées que nous défendons. Ce sont des discours politiciens auxquels il ne faut accorder aucun crédit. Les ivoiriens avec qui nous partageons cet exil et qui connaissent nos réalités quotidiennes ne prêtent même pas attention à ces propos et c'est cela le plus important pour nous. Certaines personnes sont surprises par notre capacité de résistance malgré la pénibilité et le dénuement total. Ils auraient tant aimé nous voir en haillon et faire pitié. Nous ne leur offrirons pas ce délice.


KOACI.COM : Depuis Accra, comment vivez-vous la crise qui secoue le FPI depuis 2014?


Nous avons en effet subi les contrecoups d'une crise interne née d'une volonté du camarade Affi président à l'époque, de caporaliser le parti en vue de sa vassalisation au dictateur d'Abidjan. Mais depuis le Congrès de Mama nous avons comme les textes l'indiquent et dans le respect scrupuleux de ceux-ci résolu ces problèmes internes avec l'élection du président Laurent GBAGBO à la tête du parti.
Malheureusement, l'ancien président Pascal Affi N'Guessan, fort du soutien du régime Ouattara, continue de mener des actions qui visent à mettre à mal le parti, ses cadres et ses membres.
J'aurais préconisé au camarade Affi s'il souhaite être encore utile au parti d'aller voir son doyen et aîné Sangaré qu'il connait parfaitement et qui a été son meilleur avocat et promoteur dans le Fpi afin de faire amende honorable. Ce serait à son actif. Quelque chose de positif pourrait sortir de cette démarche.
Dans le cas contraire, lui et ses soutiens du régime Ouattara pourront certainement continuer d'emmerder le FPI, de le retarder et faire emprisonner d'autres camarades mais nous aurons le dernier mot. Le président Sangaré triomphera, ce n'est plus qu'une question de temps.


KOACI.COM : De quel camp se trouve Damana Pickass?

D.A.P: J'appartiens au FPI qui est en lutte pour la libération du président GBAGBO et de tous les prisonniers politiques civils comme militaires. Je suis du FPI qui est en lutte pour le retour sécurisé de tous les ivoiriens en exil, je suis du fpi qui croit et se bat pour la libération totale de mon pays. Je suis vice-président de ce FPI là et j'ai été nommé par Laurent GBAGBO son président.

KOACI.COM : La politique de la chaise vide peut-elle payer?


D.A.P: Qu'est-ce que vous appelez chaise vide? Aucune chaise n'est vide cher monsieur. Ce n'est pas parce que nous refusons la forfaiture électorale que nous n'occupons pas de chaise. Tant que les militants sont en phase avec nous, notre chaise est toujours occupée par nous-même. C'est plus la cause que nous défendons qui nous crédibilise aux yeux de notre peuple que notre participation sans intérêt ni enjeux à des comédies électorales.
Ne vous en faites pas pour le FPI, le jour où nous déciderons de participer à des élections, ce sera pour les gagner, un peu comme Mandela et l'ANC.


KOACI.COM : Un mot sur le referendum sur la constitution annoncée fin 2016?


D.A.P: Je ne sais vraiment pas pourquoi monsieur Ouattara veut nous importuner ou nous narguer avec son affaire de révision constitutionnelle illégale. Il fait déjà ce qu'il veut dans ce pays sans s'en référer à qui que ce soit encore moins à la constitution. La loi a- t-elle une fois empêché Monsieur Ouattara de faire ce que bon lui semble dans ce pays? M. Ouattara est la constitution, il est l'assemblée nationale (légifère par ordonnance sans le parlement), il est la justice, le conseil constitutionnel. La cote d'ivoire est un bien patrimonial des Ouattara. C'est leur printemps, qu'ils en profitent au maximum.


KOACI.COM : Pour revenir à la crise post-électorale, certains vous perçoivent comme l'homme par qui arriva le malheur...


D.A.P: Dites plutôt l'homme par qui est arrivé leur malheur. En effet pour les comploteurs c'est à dire le RDR et leurs alliés, je suis l'homme par qui leur forfaiture a été mise à nu, révélée à la face du monde entier. Ils ne m'avaient pas prévu dans leur scénario et j'ai été ce grain de sable salvateur pour le pays qui a grippé toute leur machine à tricher. C'est après leur échec à la CEI qu'ils ont multiplié les impairs et les faux pas qui ont permis de les démasquer véritablement, eux et leurs parrains alliés. L'acte de la CEI a donné des raisons valables aux ivoiriens d'y croire et d'engager le combat dans lequel nous sommes encore aujourd'hui et que nous gagnerons. Oui je constitue leur malheur mais pour une grande majorité du peuple je suis la main bénie de Dieu.(rires aux éclats).


KOACI.COM : Que s'est-il passé ce jour pour que votre image fasse le tour de toutes les télévisions du monde?


D.A.P: Qu'est ce qui n'a pas encore été dit et redit sur ces événements de la CEI que je dois encore vous dire? Des braqueurs d'élections ont été surpris et stoppés dans leur élan frauduleux. Compte tenu de l'ampleur du braquage et des acteurs nationaux et internationaux impliqués dans cette supercherie, l'affaire a fait le tour du monde et continue encore aujourd'hui de faire parler d'elle à la CPI, à Abidjan et dans plusieurs pays. Les braqueurs sont dans tous leur état car les vrais propriétaires du bien veulent reprendre ce bien. C'est un combat qui fait bruit.


KOACI.COM - : Si c'était à refaire?

Ne me posez même pas la question. La réponse est évidente. Rebelote.


KOACI.COM : Selon des rumeurs, vous avez des contacts officieux avec Guillaume Soro dans la perspective des élections de 2020? Si faux quelle est la nature de vos relations?


D.A.P: C'est archi faux et je n'ai aucun rapport avec M. Guillaume Soro pour l'instant.


KOACI.COM : De quoi vivez-vous en exil quand on sait que vous ne travaillez pas?


D.A.P: Grace à Dieu, on arrive à survivre. Jesus Christ est Seigneur et souverain, il pourvoit pour moi et ma famille.


KOACI.COM : Et si les conditions que vous souhaitez n'étaient jamais réunies, pensez-vous à votre famille, votre région?


D.A.P: Je ne suis plus à ce niveau depuis longtemps. Je suis dans une dimension qui me situe au-delà de ma personne, de ma famille, de ma région. J'ai même vaincu la mort cher monsieur. Mais les conditions que nous demandons finiront par être réunies, il n'y a pas de doute à ce niveau. Nous rentrerons dans notre pays je puis vous le garantir et cette rentrée en côte d'ivoire ne se fera pas nuitamment.

KOACI.COM : Avez-vous prévu le scénario que GBAGBO soit condamné pour les crimes qu'on lui reproche par la CPI?


D.A.P: Mais quel autre scénario serait-il raisonnable de prévoir avec une telle cour? Tout ce qui est fait dans cette cour concourt à la condamnation de Laurent GBAGBO. Nous envisageons ce scénario catastrophique pour la Cote d'Ivoire mais cela n'entamera pas notre mental et notre soif d'une Cote d'Ivoire libre, démocratique et prospère. La lutte continuera de plus belle si c'est à cela que vous voulez en venir.


KOACI.COM : Pourquoi ne pas demander pardon au pouvoir en place?


D.A.P: Qu'est-ce que nous avons fait de mal à Ouattara pour lui demander pardon avant d'être autorisé à rentrer dans notre propre pays? Aussi longtemps que je ne comprendrai pas le sens et la portée d'un tel pardon, je ne le ferai pas.


KOACI.COM : Un dernier mot à l'endroit des ivoiriens depuis votre exil.


D.A.P: Au terme de cette interview, je tiens à vous saluer et à remercier le peuple ivoirien pour sa résistance héroïque. De la diaspora jusqu'en côte d'ivoire, c'est tout un peuple qui refuse de plier et de capituler. Conscient que nous sommes que ce combat est vital et existentiel pour nous. Qu'il continue avec la même détermination, la même fermeté et constance car tout le monde doit savoir pour une fois ce que nous voulons réellement.
Que le peuple ivoirien soit très serein car nous aurons la victoire très bientôt. J'adore ce peuple.

Interview réalisée depuis Abidjan par Donatien Kautcha
source : KOACI    |    auteur : Donatien Kautcha

A voir egalement

Publicité
Publicité