Boubakar Koné (Fpi-camp Sangaré): « On déclare Compaoré éligible bientôt à la présidence de la République en Côte d'Ivoire »

  • publiè le : 2016-10-16 18:09:57
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Boubakar Koné (Fpi-camp Sangaré): « On déclare Compaoré éligible bientôt à la présidence de la République en Côte d'Ivoire »

(Photo d'archives pour illustrer l'article)

Koné Boubakar a critiqué la Constitution que Ouattara veut donner à la Côte d'Ivoire (Photo d'archives)
En Côte d'Ivoire, c'est officiel, le référendum pour une nouvelle Constitution aura lieu le 30 octobre 2016.

Mardi 11 octobre, les députés ont approuvé le projet à une très large majorité. Il est vrai que, depuis son boycott de décembre 2011, le Front populaire ivoirien de Laurent Gbagbo n'est pas présent à l'Assemblée nationale. Boubakar Koné est actuellement le Premier secrétaire général adjoint de la tendance pro-Gbagbo du Fpi. En ligne d'Abidjan, il répond aux questions de Christophe Boisbouvier.

RFI : Qu'est-ce que vous pensez du projet de nouvelle Constitution ?
Boubakar Koné : Les Ivoiriens sont dans leur ensemble très sceptiques, parce que le régime du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (Rhdp), qui est au pouvoir en ce moment, n'est pas du tout crédible. La première raison, c'est que ce régime n'a pas habitué les Ivoiriens au respect de la loi en général et de la Constitution en particulier. Juste quelques petits exemples rapides. La Constitution de 2000 interdit que le président de la République soit en même temps président d'un parti politique. Monsieur Ouattara demeure à ce jour, après six longues années passées au pouvoir, président du Rdr, le seul parti politique en Côte d'Ivoire qui est armé, en violation de toutes les dispositions légales. Secundo, à la date d'aujourd'hui, le chef de l'Etat refuse de déclarer son patrimoine alors que la Constitution l'y oblige. Enfin, la coalition au pouvoir en Côte d'Ivoire y est, par rébellion, armée, coup d'Etat et bombardement du pays par des puissances militaires étrangères, aucun article de la Constitution n'autorise cela. Deuxième observation, au lieu que l'avant-projet de cette Constitution émane des différentes composantes du corps socio-politique, voilà qu'il est rédigé par un Comité d'experts nommé par le chef de l'Etat lui-même. Troisième remarque, la célérité avec laquelle le processus se déroule, alors qu'il n'y a aucune urgence, rend ce projet proprement suspect, parce que l'examen de ce projet par l'Assemblée nationale n'a duré qu'à peine cinq jours pour décortiquer 184 articles. Alors pour toutes ces raisons, des voix plus autorisées que la mienne, c'est-à-dire d'éminents juristes, se sont opposées à ce projet. Je veux parler du professeur Francis Wodié, ancien président du Conseil constitutionnel, du professeur Réné Degni-Segui, ancien membre du Conseil constitutionnel. Donc l'autorité est assise en termes de droit.
Mais Boubakar Koné, si vous n'aviez pas boycotté les législatives de 2011 et si vous étiez présent dans cette Assemblée nationale, peut-être que les débats auraient été différents, ces derniers jours ?
Écoutez, il ne suffit pas d'être candidat pour avoir le siège. Encore il eut fallu que le scrutin soit transparent !
Sur le texte lui-même, Alassane Ouattara dit que si ce projet est adopté, la future Constitution sera moins confligène que l'actuelle. Qu'est-ce que vous en pensez ?
Au contraire, on ne peut pas dire que la démocratie est renforcée quand le président de la République va nommer le Vice-président. On ne peut pas dire qu'il y a une avancée démocratique, quand le président de la République va nommer une partie du législatif. On ne peut pas dire qu'il y a avancée quand un article sur les conditions d'éligibilité, dit qu'il n'y a pas de plafond, c'est-à-dire qu'à 100 ans on peut toujours postuler à la présidence de la République, ce n'est pas des avancées, c'est des reculs graves.
Reprenons vos points un par un. Vous parlez du poste de vice-président. En effet, le premier futur Vice-président sera nommé par l'actuel président Alassane Ouattara mais à partir de 2020, les électeurs choisiront un ticket président-Vice-président et ce seront les Ivoiriens qui décideront ?
Mais dans ces conditions, si on veut être transparents et si on veut faire avancer la démocratie pourquoi ne pas attendre 2020 ? Si il n'y a rien de suspect, quelle est l'urgence ?
En ce qui concerne le Sénat, pourquoi êtes-vous hostile à cette éventuelle deuxième Chambre ?
D'abord parce qu'il n'est pas utile de l'avoir. Deuxièmement parce qu'elle serait budgétivore. Et en troisième lieu, l'intention que l'exécutif nomme des membres du législatif va à l'encontre de la séparation des pouvoirs.
Et ce qui concerne les conditions d'éligibilité, il n'y aura plus le plafond de 75 ans, en effet, mais qu'est-ce qui vous choque dans cela ?
Ce qui me choque, c'est que monsieur Ouattara à 74 ans. Donc qu'est-ce qui motive qu'il n'y ait pas de plafond à la présidence de la République ?
Mais il n'y aura pas qu'Alassane Ouattara qui pourra profiter de cette disposition, il y a aura aussi le Pdci-Henri Konan Bédié ou le Fpi-Abou Drahamane Sangaré ?
Non, mais c'est ce que je vous dis, il ne s'agit pas de contenter des individus, il s'agit d'énoncer des principes qui font avancer la démocratie, et là ce n'est pas le cas. Le but de notre combat, ce n'est pas que monsieur Abou Drahamane Sangaré soit candidat à la présidence de la République à l'âge de 100 ans, ce n'est pas ça notre objectif.
Toujours à propos de ces conditions d'éligibilité, dans la Constitution actuelle, l'article 35 est très discriminant, la future Constitution, si elle est adoptée, le sera beaucoup moins. Est-ce que n'est pas un changement qui va permettre de rassembler ?
Mais au contraire, c'est un changement qui est trop permissif. On déclare donc l'ancien président du Burkina Faso, monsieur Compaoré, éligible bientôt à la présidence de la République en Côte d'Ivoire.
Dans la Constitution actuelle, il faut garantir que ces deux parents sont Ivoiriens de naissance pour être candidat à la présidentielle, et dans l'éventuelle future Constitution, il suffira que l'un des deux parents soit ivoirien de naissance, ça ne vous paraît pas suffisant ?
Écoutez, ça ne me paraît pas suffisant. D'autant plus que l'ancienne Constitution ne posait de problème qu'au seul Ouattara.
Boubakar Koné, qu'est-ce que vous allez faire à la fin de ce mois pour le référendum constitutionnel ?
Mais nous allons organiser des manifestations de rue pour l'empêcher.
Et si ce référendum se tient quand même ?
Si la consultation se tient quand même, nous allons nous réunir pour décider.
Vous pouvez envisager d'appeler à y voter « non » par exemple ?
Écoutez, je pense, il faut qu'on soit conséquents avec nous-mêmes. Les conditions qui nous ont amenés à ne participer à aucun scrutin à ce jour n'ont pas changé d'un iota. Il sera difficile de nous dédire.
Donc a priori, quoi qu'il arrive, vous ne participerez pas à ce référendum ?
Je pense que le Front populaire ivoirien qui n'a pas l'habitude de se dédire, ne trouvera pas là les moyens de faire autrement.
Et participerez-vous aux législatives de la fin de cette année ?
C'est la même chose.

source : RFI

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