Les Ivoiriens musulmans craignent ne pas avoir suffisamment de moutons à sacrifier le jour de la Tabaski. L'ovin se fait rare à quelques jours de la Tabaski. La raison est à chercher chez le fournisseur. Pour la 2e année consécutive, le Niger, principal fournisseur en bétail de la Côte d'Ivoire, en a interdit l'exportation en raison de l'insécurité qui favorise les razzias. Conséquence: le prix de l'ovin s'envole.
Le marché de bétail en Côte d'Ivoire est en majeure partie approvisionné par le Niger, grand exportateur surtout vers la Côte d'Ivoire, le Nigeria et autres pays voisins. Cependant, depuis des années, l'élevage dans ce pays sahélien est fortement perturbé par l'insécurité qui favorise le vol des bêtes à grande échelle perpétré par les groupes armés jihadistes.
Le 9 mai, le ministère nigérien du Commerce a publié un décret interdisant l'exportation de bétail, au grand dam des éleveurs qui craignent pour leur trésorerie. Ces razzias, rares autrefois, constituent «l'une des principales entraves au développement de l'élevage dans la sous-région» selon le chargé de la santé et des productions animales au bureau sous-régional de la FAO pour l'Afrique de l'Ouest.
Pour sa préparation de la «fête des moutons» Laho Younoussa, fidèle musulman, s'est rendu au parc à bétail d'Adjamé Macaci pour s'enquérir des prix des bêtes. Sur place il se rend compte de cette réalité. «Ça fait environ 45 minutes que je sillonne dans le parc, sans trouver mon bonheur. Je suis venu avec 100.000 Fcfa (1 euro = 655,95 francs CFA), mais je n'ai pas pu obtenir une bête à ma convenance. Car les prix sont largement supérieurs à ce que j'avais prévu et vont de 180.000 à 200.000 Fcfa et plus. À cette allure, il sera difficile pour moi de trouver un ovin à un bon prix», témoigne Laho Younoussa, avec un air de désolation.
Une flambé de prix mise à l'actif de plusieurs situations. «Cette année le marché est morose. Jusque-là nous ne sommes pas assez bien approvisionnés. C'est dû au problème au Niger, au Burkina Faso..., principaux pays qui ravitaillent nos marchés. Cependant les autorités nous ont rassuré que tout rentrera dans l'ordre», explique Fousseni Traoré, président du parc à bétail d'Adjamé-Macaci.
A cela faut-il ajouter les taxes municipales, les pas-de-porte et autres charges auxquelles doivent faire face les vendeurs les contraignant à hausser les prix. «La situation qui prévaut dans les pays qui nous approvisionnent fait que cette année les animaux sont transités par le Ghana avant de regagner Abidjan, ce qui occasionne forcément des dépenses supplémentaires. Et cela a une répercussion sur nos ventes», décrit Cheick Mohamed, un commerçant.
Avant de déplorer une certaine injustice orchestrée par des agents de municipalités, «quand la mairie nous a fait déménager sur ce site, on nous avait promis de nous installer gratuitement. Mais à notre grande surprise, on nous demande de payer la place à 250.000 Fcfa juste pour deux semaines. C'est trop! Nous sommes donc obligés d'augmenter les prix pour pouvoir s'en sortir. D'ailleurs cette somme qu'on nous demande de payer ne figure même pas sur les factures».
Pour sa part, le président de ce parc à bétail, tout comme le gouvernement ivoirien, rassure que les dispositions sont prises pour que le marché soit suffisamment ravitaillé.
«Désormais le mouton vient plutôt par Noé et que par Ouangolo. Nous avons commencé à travailler avec les interprofessions mais aussi avec tous les ministères concernés pour une meilleure répartition des bêtes disponibles», a souligné Sidi Tiémoké Touré, ministre des ressources animales et halieutiques.
Dans le cadre de la diversification de ses sources d'approvisionnement en bétail vif, la Côte d'Ivoire vise également à renforcer sa coopération avec d'autres pays notamment le Tchad. Le ministre des Ressources animales et halieutiques, Sidi Touré, a récemment lancé une stratégie globale visant à renforcer la production animale nationale et sécuriser durablement la chaine d'approvisionnement en bétail.
Par Emmanuel Djidja (Abidjan, correspondance)
source : afrique.le360.ma