Alors que le cours du rouble est au plus bas face au dollar et à l'euro depuis 2022, la Banque centrale de Russie (BCR) devient le 21%u1D49 pays au monde à lancer une monnaie numérique, selon le comptage du groupe de réflexion Atlantic Council.
Mardi 15 août, la Banque centrale de Russie (BCR) a lancé une phase d'essai du rouble numérique en permettant des "opérations réelles pour personnes physiques et juridiques". Comme le rapporte le quotidien Izvestia, 600 personnes physiques et 30 entreprises dans 11 villes, ainsi que 13 banques (parmi lesquelles Rosbank, Gazprombank, Alfabank, VTB), participent à l'expérience pilote. Seront testées des opérations basiques telles que l'ouverture d'un compte numérique et son alimentation, le paiement de produits et de services en roubles numériques, le transfert d'argent entre personnes physiques à l'aide d'un numéro de téléphone.
"D'ici deux mois nous serons, je pense, en mesure d'élargir l'expérience", a déclaré la première vice-présidente de la Banque centrale de Russie, Olga Skorobogatova, rapporte le quotidien Nezavissimaïa Gazeta. "De nombreux autres participants attendent leur tour" et 19 banques supplémentaires ont exprimé le souhait d'intégrer le processus, a-t-elle ajouté.
Les journaux russes s'évertuent à expliquer à leurs lecteurs ce qu'est une monnaie nationale numérique. Car d'après certains sondages, une large majorité de Russes ne comprennent pas en quoi consiste cette innovation. Selon une enquête du Centre russe d'étude de l'opinion publique menée en juillet, 70 % des citoyens de Russie sont plus ou moins au courant de l'introduction de cette nouvelle monnaie, poursuit la Nezavissimaïa Gazeta. Mais 51 % des personnes interrogées ne savent pas "à quoi elle sert", 41 % n'en "comprennent pas le mécanisme" et 58 % "n'ont pas l'intention de l'utiliser".
Ce n'est pas une cryptomonnaie
Le rouble numérique constitue une "troisième forme de la devise nationale", explique le site de la chaîne russophone RTVI, au côté de la monnaie fiduciaire (le rouble en pièces et en billets) et de la monnaie scripturale (seulement matérialisée par une écriture sur un compte bancaire). Il se base sur la technologie de la blockchain, qui permet d'effectuer des transactions directes, sécurisées, moins faciles à sanctionner, mais il ne s'agit pas pour autant d'une cryptomonnaie. En effet, le rouble numérique "n'est pas décentralisé, mais conservé et émis par la Banque centrale", et son cours correspond à celui de la monnaie nationale.
Il apparaît dès lors que l'un de ses objectifs principaux est de contourner les sanctions internationales mises en place dans la foulée de l'invasion de l'Ukraine en proposant un mode alternatif d'échange, sans passer par les banques commerciales. La plupart des banques russes ont été bannies du réseau Swift, une messagerie électronique sécurisée reliant près de 11 000 banques dans le monde.
Faciliter les échanges commerciaux avec la Chine
Le journal gouvernemental Rossiiskaïa Gazeta explique que l'introduction du rouble numérique offre des commodités pratiques et permet notamment d'améliorer le contrôle des flux dans la lutte contre la corruption. Mais pour la Russie, "il s'agit aussi de ne pas prendre de retard sur d'autres grandes puissances", comme la Chine, qui a mis au point le yuan numérique dès 2014 et qui comptait, en 2022, "des dizaines de milliers d'organisations et la moitié de la population" comme utilisateurs réguliers.
Au-delà de la compétition, l'introduction du rouble numérique, remarque le titre, est surtout cruciale dans le "cadre de la nouvelle donne économique mondiale". Car, avec le yuan numérique, elle "ouvre des perspectives pour les échanges commerciaux entre la Russie et la Chine" dans le contexte des sanctions occidentales et du processus de "dédollarisation" de l'économie que les pays des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) tentent d'accélérer.
Un sondage réalisé par le portail financier russe Vyberu suggère qu'entre le mois de mars et aujourd'hui, les connaissances des citoyens russes sur la question ont évolué positivement, rapporte le site économique RBK. Selon le directeur exécutif de Vyberu, 58 % des personnes interrogée seraient aujourd'hui prêtes à utiliser la nouvelle monnaie numérique.
source : courrierinternational.com